Nul besoin d’être neuroscientifique pour connaître les effets de la carotte et du bâton. La carotte, c’est ce qui motive l’âne et le pousse à avancer. En terme plus technique, c’est l’activation du circuit de la récompense. Le bâton, c’est la promesse de la punition, ce que je veux à tout prix éviter, ce qui provoquera douleur et humiliation.
La motivation est produite par le système émotionnel ; nous recherchons spontanément les choses et les activités qui nous sont agréables et essayons d’éviter celles qui nous sont désagréables. Et ce n’est pas qu’une vue de l’esprit, puisque physiquement, chez l’Homme comme chez la plupart des mammifères, le cerveau se met à secréter massivement de la dopamine quand nous obtenons quelque chose que nous convoitons. C’est la sécrétion de cette hormone qui procure une intense sensation de satisfaction. Et c’est prosaïquement la promesse d’une libération massive de dopamine qui nous incite à agir pour obtenir ce que nous désirons.
Et parce que la dopamine n’est pas seulement libérée au moment de l’obtention de notre objet de désir, mais également avant cette obtention – c’est-à-dire pendant toute la période où nous déployons des efforts afin de parvenir à notre but – qu’elle joue un rôle central dans le processus de motivation.
Nous ne sommes pas des ânes, et nos « carottes » n’appartiennent pas à la famille des Apiaceae.
D’un individu à l’autre, selon sa personnalité et son âge, les facteurs de motivation sont très différents. Nos adolescents recherchent souvent des facteurs de motivation externes comme l’approbation (de leurs parents, de leurs professeurs) et la reconnaissance (de leur groupe de copains, de leurs pairs via les réseaux sociaux), puis devenus adultes, de leur hiérarchie, de leurs collègues, de leurs voisins, de leurs électeurs …
Mais il existe aussi de nombreux facteurs de motivation intrinsèques qui correspondent au souhait de satisfaire ses besoins, ses désirs ou ses valeurs propres. Résoudre des problèmes intellectuels complexes ou effectuer un travail délicat peut nous permettre de ressentir un plaisir fondamental indépendant de toute récompense extérieure.
Se sentir « utile », se sentir « capable », se sentir à « sa juste place », conforme à ses valeurs, trouver une voie qui permette de mettre les chances de son côté, de retrouver confiance en soi, c’est aussi (re)trouver le chemin de la motivation et de la réussite.
Si je me crois voué à un bel avenir, ou en tous cas à celui que je choisis, que je suis capable de me le représenter, j’ai de grandes chances de réussir.
En l’absence de projet, si je doute de mes capacités, mon cerveau va plutôt choisir de se repasser les échecs et les situations menaçantes du passé croyant bien faire pour anticiper les prochaines. Ainsi si mon cerveau anticipe un échec, il va déclencher un système inhibiteur de l’action. La réussite me paraissant hors de portée, le statu quo me paraît alors comme la meilleure alternative pour assurer ma survie. Ne rien faire plutôt que de me mettre en danger et d’échouer. Me rouler en boule sous ma couette, regarder des séries ineptes, attendre que le temps passe et m’apporte (comment ?) une solution, c’est un peu faire le mort comme un petit mammifère qui se retrouve en plein champ et aperçoit un rapace au-dessus de lui… la meilleure chose à faire est encore de ne pas bouger et d’espérer passer inaperçu.
Nous n’avons ni les mêmes besoins, ni les mêmes valeurs, ni les mêmes personnalités, ni les même talents. Nos sources de motivation sont spécifiques. Mais ce qui est valable pour tous, c’est que si l’on s’engage dans un projet qui fait écho à nos valeurs fondamentales et qui s’inscrit dans notre histoire, nous tirerons certainement du plaisir à le mener à bien.